L’origine du port de Rocher
Quelle est l’origine du port de Rocher?
Le port de Rocher à de La Teste de Buch est implanté sur les près salés est.
Il est devenu un port ostréicole dans les années 1970, à la demande des ostréiculteurs installés sur le port du centre de La Teste.
Ce « nouveau port » tient son originalité de son absence de cabanes en bois traditionnelles. Ainsi, dans l’idée de créer un outil de travail moderne et fonctionnel, 20 hangars de 12 mètres de large ont été bâtis devant les viviers servant au stockage des huitres.
Lors de sa création, le port de Rocher était considéré comme l’outil professionnel le plus moderne du Bassin d’Arcachon.
Remis au normes en 2001, il est un des ports les plus dynamiques de notre Bassin.
Mais quelle est l’origine du port de Rocher?
Nous avons tous déjà entendu ou lu « port du rocher »….
Il est vrai qu’à l’entrée de ce port pour consolider la digue des blocs de pierres sont entassés.
Mais le nom ne vient pas de ces pérrés…
Il faut remonter au début du 20° siècle pour comprendre l’origine du mot « rocher » qui est en réalité un nom de famille.
La famille Rocher à l’origine du port de Rocher
Le professeur Rocher, né à Bordeaux en 1876. Il fut mobilisé pendant des études de médecine en service auxiliaire en 1914. Puis, il fut médecin aide major de 2e classe en 1914 et médecin chef de l’hôpital temporaire n°9 à Bordeaux, chirurgien du centre hospitalier d’Epernay en 1915. En 1916 il devint médecin major de 1ère classe, chirurgien chef du 3e secteur de la 5e région, puis, chirurgien complémentaire de la 18e région à Bordeaux de 1918 à 1919.
A sa démobilisation en juillet 1919, il poursuivra une brillante carrière civile au poste de professeur honoraire de clinique chirurgicale infantile et orthopédique à l’Université de Bordeaux.
Auteur de plusieurs recherches sur les mains botes et l’ostéosynthèse, il publia de nombreux écrits sur la chirurgie infantile, sa spécialité.
Le professeur Rocher, notable arcachonnais
Sa villa L’Abbaye, se situait au Pilat près de La Corniche.
Il était particulièrement impliqué dans la vie arcachonnaise et le journal L’Avenir d’Arcachon le citait régulièrement. Avec les docteurs Lalesque et Bailly, il assurait le service médical du préventorium Armaingaud. Il reçu la médaille d’or de l’Education Physique pour son engagement au sanatorium.
Régulièrement il participait à des congrès de médecine organisés à Arcachon. Il vantait à merveille notre ville avec éloquence et poésie: « En cette tourmente économique, une seule richesse compte. De ce capital-vie, Arcachon est le meilleur et le plus honnête banquier. Son rivage d’or pâle, sa douce forêt embaumée, son bassin à la physionomie si diverse…..«
Cet homme généreux et mondain recevait régulièrement dans sa villa du Pilat les notables arcachonnais. Pierre Dignac, sous-secrétaire d’état, Monsieur Gounouilhou maire d’Arcachon et le professeur Portman régulièrement venaient diner chez lui.
Précisons que, le professeur Rocher fut également Chevalier de la Légion d’Honneur en 1921 et Officier de la Légion d’Honneur en 1952.
Son fils Christian Rocher
En 1908, il eut un fils Christian.
Christian Rocher fit aussi des études de médecine et devint chef de service de kinésithérapie des hôpitaux de Bordeaux.
Marié en seconde noces au Docteur Thérèse Hubschmann en septembre 1940, il acheta 3 ans plus tard, une très grande parcelle des près salés est. Au fil des années, les époux Rocher devinrent propriétaires de près de 85 hectares de différentes sections cadastrales allant des Prés salés ouest aux Prés salés est.
Ainsi naitra le Domaine des Rocher qui est donc à l’origine du port de Rocher. Le professeur Rocher imagina un blason qu’il sculpta pour la propriété.
Le Domaine des Rocher
Sur leur propriété se trouvaient des bâtiments non cadastrés tels qu’une maison d’habitation, un chai et diverses dépendances tout près du Moulin de Bordes. La propriété était alimentée en eau potable et en électricité. C’était leur résidence secondaire. Ainsi, à chaque vacances, les Rochers se retrouvaient dans ce petit paradis. Leurs enfants Marie-Diane et Hubert (ces prénoms sont le signe de son amour passionné pour la chasse) et Brigitte (fille de sa première union avec Lucienne Duhar) ont du y passer des vacances inoubliables.
Cette véritable réserve naturelle regorgeait lors des grandes marées d’anguilles et de crabes. Christian Rocher amoureux de la nature était également un passionné de chasse. Il installa en 1948 une tonne sur le domaine pour y chasser le canard.
Notons qu’il est aussi l’auteur d’un livre extraordinaire sur la chasse aux gibier d’eau et aux oiseaux migrateurs. Son livre fut tiré à 500 exemplaires et il est considéré encore de nos jours comme le seul véritable ouvrage de référence, comme la « Bible » des chasseurs.
Il n’est pas rare de le voir encore dans certaines d’une vente aux enchères. L’an dernier, des jeunes chasseurs ont fait rééditer cette véritable anthologie de la chasse au gibier d’eau. En 1979 une autre de ses livres fut édité à 225 exemplaires aux éditions de l’Orée: » La chasse des Palombes et des Tourterelles « . Ces ouvrages cynégétiques sont toujours reconnus actuellement comme étant des références incontournables.
Ajoutons que le cinéaste de talent, Patrick Glotin, a réalisé une film documentaire sur Christian Rocher pour la chaine Seasons en 2011. Largement illustré de photos d’archives issues de collections privées, ce film magnifique nous entraine dans l’univers de la chasse traditionnelle. Empreint de nostalgie, il nous ramène à une époque de liberté et d’abondance, avant que Bruxelles et les anti-chasse ne viennent tout compliquer.
L’ouragan arriva en 1951
Un terrible ouragan, mentionné dans le rapport Beaupuy, provoque un raz de marée en 1951 et va inonder l’ensemble des Prés salés. Le 29 décembre 1951, à la pleine mer vers 7 heures et un fort vent de nord-ouest, un coefficient de 89 permettait de prévoir une hauteur d’eau de 4,10 mètres. En réalité avec la tempête, l’eau est montée de 1.50 mètre de plus pour atteindre une cote de 5,60 mètres.
Le domaine fut inondé car la digue construite en 1869 à lâcha sur environ 35 mètres. Les inondations allèrent au delà de la ligne de chemin de fer. Des dizaines de maison et d’exploitations furent détruites.
La base de Cazaux fut appelée en renfort, et envoya un premier contingent de soldats. De partout des dons arrivèrent. Des milliers de sacs portés par des hommes et des tonnes de sable arrivèrent par camion pour renforcer et réparer la digue. Puis la tempête se calma, l’eau finit par se retirer avec le changement de marée et l’étendue des dégâts fut visible.
Tout était détruit. Les cultures maraichères importantes dans cette zone devenaient impossible pour les deux ou trois années à venir. Les exploitations ostréicoles était aussi très endommagées. L’ouragan sur son chemin, dévasta également bon nombre de villas proches du littoral sur le Pilat. Des chalutiers furent jetés à la côte, des pinasses et des navires furent éventrés. Jusqu’à l’embouchure de la Leyre presque tous les viviers, réservoirs à poisson et cabanes ostréicoles furent détruits.
Cette catastrophe vint compromettre l’avenir de cette zone des Prés salés. Alors, la Société des Domaines des Prés salés ( Prés salés est) ainsi que divers petits propriétaires privés se regroupèrent et créerent une association pour se défendre. Ils tentèrent une démarche auprès du préfet de la Gironde pour obtenir une aide publique et des facilités financières.
L’ampleur de la catastrophe était telle qu’un arrêté préfectoral déclara sinistrées beaucoup de communes riveraines du Bassin d’Arcachon. En vue de permettre la réfection des ouvrages de défense, une loi fut votée le 19 juillet 1952, qui décida de l’ouverture d’autorisations de programme et de crédits de paiement.
Puis, dans les années qui suivirent, d’interminables procédèrent qui n’aboutiront à rien et vont finir par remettre la notion de Domaine Maritime en avant. Il faut noter que les deux précédent raz de marées de 1898 et 1924 avaient déjà tout détruit. Ce troisième allait faire définitivement basculer le statut de cette zone.
Qui devait entretenir et réparer? Les notions de droit d’usage, de propriété, de Domaine Martime furent débattues en délibérations multiples et complexes.
Un des points majeurs qui sera mis en avant est que cette zone ne pouvait pas être pris en compte financièrement par la collectivité car ils s’agissait de propriétés privées.
Et puis, malheureusement, en 1955 et 1957, deux autres tempête à nouveau dévastèrent les Prés salés.
La Société Civile du Domaine de Suroît
Le 10 décembre 1965 la Société Civile des Prés salés vendit le domaine des Rocher à la Société Civile du Domaine de Suroît.
Je n’ai rien trouvé de précis sur cette nouvelle étape. Comment au milieu de ces délibérations interminables qui allaient d’espoirs en déceptions, le domaine a-t-il pu être vendu? A qui appartenait cette Société Civile du Domaine de Suroit? Le docteur Rocher avait-il vendu son domaine à la Société des Prés Salés?
La Société Civile Immobilière de Suroît avait l’intention de créer sur ce domaine un véritable nouveau quartier de la teste. Sur le site » toponimielateste.free.fr » il est écrit que des projets pharaoniques étaient prévus. Entre autres, deux ports: un en eau profonde et un port d’échouage. Il prévoyait aussi 600 à 700 logements individuels, et de 1000 à 1500 logements en immeubles collectif, dotés d’un centre commercial, d’un centre culturel et un terrain de sport. Sur le site » shaapb.fr » n’est mentionné qu’un projet de réservoirs à poissons…
Mais le 3 octobre 1967 le Conseil d’état déclara cette zone de » prés salés Rocher » faisait partie du Domaine Maritime et le sujet fut presque clôt.
On peut trouver cependant sur internet la copie d’un jugement Cour administrative d’appel de Bordeaux de 2011 (1), ainsi qu’un pourvoi en cassation datant de 2015 (2).
Finalement, dans les années 1970, le domaine des Rocher fut aménagé en port ostréicole.
Voici 3 capture d’écran réalisées sur le Portail de l’IGN qui nous montrent l »évolution des Prés salés est.
Cet article n’est pas achevé. J’espère obtenir davantage de détails et d’explications. Tous les contributeurs seront évidemment cités.
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007242463. (1)
https://juricaf.org/arret/FRANCE-COURADMINISTRATIVEDAPPELDEBORDEAUX-20111110-11BX00098. (2)
https://bassin-arcachon-patrimoine-naval-plaisance.fr/2021/11/22/la-vague/
Un agréable parcours dans le temps qui permet de ne pas rester ignorant sur le passage et la marque qu’impriment des hommes influents qui malheureusement s’efface avec le temps.
Merci Guy!
Notre patrimoine naval regorge de belles histoires importantes à écrire afin d’en laisser trace…
Très cordialement,
Claudine
Bonjour,
Je connais très bien la naissance du port de Rocher, et si vous le souhaitez je pourrais vous raconter cette incroyable histoire relative à la naissance de ce port. Cordialement Annie LAFON ROSA
Bonjour Annie,
Ce serait avec grand plaisir !
L’occasion de se concentrer sur la création du port après cet article sur son origine.
Je suis joignable sur messenger ou par mail:
claudine-busca@orange.fr
Très cordialement,
Claudine