Le bois de nos pinasses
Le bois de nos pinasses provenait essentiellement de la forêt usagère dont le statut fut officialisé au 15° siècle.
Cette forêt primaire se situe sur un territoire qui, au second mariage d’Alienor d’Aquitaine en 1154, deviendra pour 3 siècles un Duché rattaché à la couronne anglaise. Il sera divisé en Captalats. A la fin de la guerre de Cents ans, il sera octroyé aux habitants du pays de Buch le droit d’exploiter la forêt dans le cadre du gemmage ou pour le bois de chauffage et les constructions diverses.
De la guerre de Cent ans au bois de nos pinasses
La fin de la guerre de Cent ans peut être considérée comme un des détonateurs qui à favorisé le développement de nos pinasses. En effet, c’est à partir de cette époque que Jean de Foix officialisa le statut de la forêt. Bien entendu, ce n’est pas l’unique raison, mais cet épisode vaut tout de même la peine de s’y attarder sur quelques lignes…
Jean de Foix
Jean de Foix était le fils de Gaston 1° de Grailly-Foix, Captal de Buch au service du roi d’Angleterre Henri VI Plantagenêt. Il naquit après 1410, fut captal de Buch, vicomte de Meille et de Castillon et aussi comte de Candale (francisation de Earl of Kendal) et de Benauges.
Lors de la bataille de Castillon en 1453 qui marqua la fin de la guerre de Cent ans et de la domination en Guyenne, les Français capturèrent Jean de Foix. Charles VII (roi de France) décida par un fin calcul de l’envoyer au château de Taillebourg retenu prisonnier par le sénéchal de Guyenne Olivier de Coëvity pendant sept ans.
Précisons que les Anglais capturèrent Olivier de Coëvity en 1452. En 1453, juste avant sa mort, John Talbot avait fixé le montant de sa rançon. Il en régla une première partie en 1454 lui permettant d’être libéré et restait engagé sur les trois années suivantes à en régler le solde. Il devait ainsi encore la somme de 23850 écus.
La capture de Jean de Foix arrivait à point. Charles VII avait certainement imaginé permettre ainsi libérer son sénéchal de sa dette due aux Anglais. Olivier de Coëvity allait solder sa rançon contre celle de Jean de Foix. Ce dernier régla dans un premier temps 5850 écus et fut libéré le 30 janvier 1460 et rentra en Angleterre rejoindre son épouse Maguerit de Suffolk.
Le roi est mort, vive le roi!
A ce moment, la situation en France Bascule. Le roi Louis XI succède à son père et il est animé d’une haine absolue envers les personnes qui ont servi Henri VII. Alors, il efface alors le restant dû de Jean de Foix envers olivier de Coëvity, le nomme lieutenant du roi et gouverneur du Roussillon. Il lui restitue également les terres qu’il avait en sa possession ainsi que celles de son père Gaston de Foix-Grailly. Cet acte fut vérifié, en la chambre des comptes à Paris, le 4 mai 1478, ayant été enregistré au Parlement de Bordeaux, le 18 mars 1477. (Arch. Municip. de Bordeaux, Fonds Léo-Drouyn, tome XIV, p. 40.)
Le retour de Jean de Foix
Le retour de jean de Foix est raconté dans un texte superbe édité par la revue Philomatique de Bordeaux et écrit par E. Duègne de Launaguet en 1932. En voici un résumé afin de comprendre les raison de la baillette qui suivra.
Lors de son retour il découvrit une terre appauvrie, des marécages infranchissables, l’antique voie romaine délabrée. “Tout était deuil et solitude”.
Jean de Foix arriva enfin à la nuit tombée au château de La Teste et dormi dans la chambre d’apparat de la grande tour réservée au seigneur. Un feu l’attendait “de bois résineux au parfum d’encens”.
Le lendemain après la messe de Notre-Dame des Monts, il fit le bilan de ces années passées.
Il ne restait que quelques maisons encore habitées. Les droits et privilèges du seigneur avaient étranglé la population au fil du temps. Le port était désert, quelques vieillards et veuves survivaient car le seigneur avait droit de tout: glandage, pâturage, pinassage etc. Le fruit de leur pêche nourrissait les Bordelais et les huitres extraites leurs coquilles étaient expédiées dans des sacs de toile. Alors, il ne restait aux habitants du captalat que le menu fretin et le millet…
Privée de ses droits ancestraux lors de la fermeture de la Montagne, la population était affamée et dans une misère à la limite du supportable. Les seigneurs voisins appelaient à colons en proposant des terres vacantes.
Le droit d’usage
Alors, Jean de Foix décida d’établir une baillette (charte). Il décida de partager entre tous les habitants le droit de possession de la forêt afin de l’exploiter dans l’intérêt général. Il allait ainsi permettre de repeupler le pays de Buch en allégeant les charges des habitants et en favorisant la production des produits résineux. Nous arrivions à une époque particulière ou la grande marine se développait. L’Amérique sera découverte peu de temps après et il était capital de relancer économiquement le pays de Buch.
Le “droit d’usage” apparaissait officiellement..
Cependant il faut préciser que les habitants du pays montrèrent à Jean de Foix un parchemin sur lequel son père Gaston de Foix leur avait déjà donné précédemment le droit d’utiliser le bois de la forêt..
Le droit d’usage pour le bois des construction des pinasses
C’est grâce à ce nouveau statut que la flottille du Bassin d’arcachon s’est réellement développée. En effet, avec la baillette du 10 octobre 1468, Jean de Foix donna le droit d’utiliser le bois de la forêt pour entre autres construire nos bateaux.
Ensuite, pendant des années, chaque captal modifia les règles à sa manière pour enfin en 1759, arriver à une transaction entre le Captal de Buch et les usagers de la forêt usagère:
« les non-propriétaires …soit pour la construction ou réparation de leurs bâtiments faits ou à faire, soit pour la construction ou réparation de leurs barques, bateaux, chaloupes et pinasses.»
Notons que, nous ne savons pas comment dans les statuts de cette forêt au fil du temps la notion de “tenant pins” ou “ayant pins” est arrivée. C’est là que le grand clivage est apparu entre ce que nous nommons aujourd’hui les “ayant pins” et “ayant droits”.
Il fut donc décidé de rétablir la possibilité aux « ayant droit » de prendre en forêt le bois qui leur était nécessaire à la construction de leurs maisons et bateaux. (En effet, une transaction datant de 1746 avait annulé l’acte de 1604 en décidant que les propriétaires seuls pourraient utiliser leur bois pour construire entre autre leurs bateaux…).
Ainsi, les propriétaires de la forêt nommés les « ayant pins », n’avaient pas le droit de faire commerce de leur bois. Ils ne pouvaient que vendre la résine produite par les pins maritimes. Le bois était alors mis à la disposition des habitants de La Teste, Cazaux, Gujan et le Cap ferret, pour se chauffer et construire des cabanes et des bateaux.
Alors, désormais, grâce à cette baillette de Jean de Foix, le bois de nos pinasses fut désormais à moindre frais.
(1). Joël Confoulan est le Président du Conservatoire Patrimonial du Bassin d’Arcachon. Il a réalisé cette représentation du château de La Teste à partir des plans de 1708 de Claude Masse. Ce célèbre ingénieur du roi a dessiné des cartes extrêmement précises pour l’époque et à partir de ce qu’il voyait. Grâce à des logiciels permettant de re pixeliser, le fameux château féodal de La Teste et ses quatre tours reprennent vie! http://www.conservatoirepatrimonialbassinarcachon.fr
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5422072m/f1.image.r=baillette%20de%201468?rk=64378;0
https://www.shaapb.fr/wp-content/uploads/2014/10/droitsusage.pdf
https://gw.geneanet.org/wailly?lang=fr&n=kerdeston+de+la+pole+suffolk&oc=0&p=margaret
http://racineshistoire.free.fr/LGN/PDF/Grailly_captals-de-Buch.pdf
http://www.conservatoirepatrimonialbassinarcachon.fr
https://gw.geneanet.org/peter781?lang=fr&pz=peter&nz=bachelier&p=jean&n=de+grailly+foix&oc=1
http://dzt-isto.chez-alice.fr/foix_can.htm
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6133840g/f5.item.r=bougès
http://dzt-isto.chez-alice.fr/foix_can.htm
https://www.c-royan.com/les-gens-d-ici/personnalites/entry-1057-coetivy-olivier-de.html
,https://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1877_num_38_1_446740
Bonjour Mme Busca
je ne sais pas si mon précédent courriel est passé.
Comme je vous le disais je sui l’éditeur (créateur) du journal l’Estey Malin qui est diffusé sur toutes les villes du Bassin gratuitement.
Je trouve vos articles sur le patrimoine naval passionnants, est-ce que nous pourrions en faire paraître dans notre journal en citant nos sources et notamment l’adresse de votre site.
Vos articles méritent d’être diffusé à nos lecteurs.
dans l’attente de vous lire.
Adichatz
Jean ALEXANDRE
http://www.lesteymalin.fr
05 56 82 05 38
Bonsoir Monsieur Alexandre,
En effet ne découvre juste votre message. Je vous prie de m’en excuser. C’est avec plaisir que j’accepte. Je vous remercie vivement.
Bravo Claudine
Passionnant
Merci beaucoup Pierre!